Le Livre du retour
Suite de Voyage au pays des ze-ka, dans lequel le philosophe juif polonais Julius Margolin (1900-1971) racontait son incarcération dans un camp de travail en URSS entre 1940 et 1945 (lire Télérama n°3174), ce nouveau livre inédit conte le long retour vers la liberté. Un retour semé d'embûches, d'étapes et de retards interminables. Margolin fut d'abord obligé de séjourner à Slavgorod comme « colon relégué » assigné à résidence dans cette ville perdue de Sibérie jusqu'en mars 1946. Puis, après vingt-cinq jours de train, il rejoignit Lodz, en Pologne, ville où les fantômes des juifs massacrés hantaient encore les rues. À Paris, où il retrouve une partie de sa famille, réapprenant les gestes simples d'un homme libre, Margolin n'a qu'une hâte : retrouver sa femme et la Palestine, ce pays situé « au-delà des sept mers ». Après de multiples tracasseries administratives, il put enfin s'embarquer en septembre 1946 pour Haïfa, taraudé par d'innombrables questions sur l'expérience qui l'avait privé de liberté pendant sept ans et qui pourrait se résumer par : comment lave-t-on le sang ? Si la seconde partie du livre est composée de souvenirs d'enfance, ce livre, tendu par l'écriture magnifique de Margolin, témoigne d'une période où un homme tente de se reconstruire avec dignité.
Gilles Heuré