W.H. Auden, La Mer et le Miroir
Les échos des tempêtes terrifiantes longtemps perdurent après le silence revenu. Le miroir de Wystan Hugh Auden (1907-1973) renvoie cette image incessante de nos échouages et de nos doutes soulevés par les flots déchaînés. Bruno Bayen dans son introduction à l’œuvre rappelle que Shakespeare invitait le public à interroger l’issue de la pièce qui se concluait en forme d’ouverture. W.H. Auden a relevé ce défi en écrivant ce « commentaire », le mot est faible, de la célèbre Tempête du grand poète et dramaturge britannique. La préface de ce long épilogue rédigée par Auden ose cette question : « Oh quelle autorité donne sa surprise à l’existence ? » à laquelle quelques lignes plus loin une réponse sans réponses tente : « Le monde en fait que nous aimons est une étoffe sans substance : Par-delà le mur tout le reste est silence ; Le silence mûrit, Et mûrir, c’est tout. » Sommes-nous condamnés à mûrir ? À subir cette inéluctable évolution ? Il ne faut nourrir aucune illusion, elles sont aussi dangereuses dans l’art que dans la vie de tous les jours. Le texte se termine d’ailleurs par un constat que l’on pourrait croire à tort pessimiste : « … chacun de nous sait bien pourquoi, et hélas, entrevoit le peu que nous aurons à devenir, quand nos fantômes se perdront, un simple souvenir qui s’enfuit… » Il faut découvrir cette écriture si bien rendue par la belle traduction de Bruno Bayen et Pierre Pachet et les heureux maîtrisant la langue de Shakespeare auront tout à loisir le plaisir de lire le texte original. L’œuvre est parfois difficile, mais elle suggère toujours cet écho infini de l’éternelle interrogation de l’homme sur son être et son devenir, Auden ne tente pas d’y répondre, mais invite à contempler ses différents reflets !