Le Livre du retour
Domaine : Russe

Le Livre du Retour

Julius Margolin

Traduit du russe, présenté et annoté par
Luba Jurgenson

Inédit 

Format : 135 x 205 mm
304 pages

ISBN : 978-2-35873-044-0

Mise en vente : 22 octobre 2012

25,00€

De nombreux lecteurs ont découvert il y a deux ans Julius Margolin et le récit de ses cinq années de Goulag, grâce à la nouvelle édition de son témoignage, Voyage au pays des Ze-Ka, où l’on quittait l’auteur presque brutalement, à sa sortie du camp en juin 1945, sans savoir comment se terminerait son odyssée.

Nous avons découvert que Margolin avait écrit d'autres textes où il se remémorait l'année de relégation dans l'Altaï après sa libération, et le long voyage qui devait enfin lui permettre de retourner en Palestine pour retrouver sa famille en septembre 1946. Son fils nous a aussi communiqué le début d’une autobiographie inachevée, totalement inédite. Luba Jurgenson a ainsi pu composer un ensemble parfaitement cohérent, en deux parties, « Le chemin vers l'Occident » et « Huit chapitres sur l'enfance », qui n’est pas sans faire songer à La Trêve, de Primo Levi.

Après un séjour d’une année à Slavgorod, ville de l’Altaï où il a été assigné à résidence à sa libération du camp, Margolin est rapatrié au printemps 1946 vers Lodz et Varsovie avec d’autres victimes polonaises des déportations staliniennes, pour regagner à l'automne Tel-Aviv en tant que résident de la Palestine mandataire, en passant par Paris et Marseille. Le récit de voyage, qui avait fourni le schéma pour relater l’expérience du Goulag, modèle également le retour. À chaque lieu correspond un récit : Slavgorod, Lodz, Varsovie (des pages magnifiques sur son retour à la vie d’homme auprès d'une femme, après sept années de camp et de relégation), Paris, Marseille. Sont également relatés les longs trajets entre ces étapes : le « train de la liberté » qui conduit Margolin de Slavgorod à Lodz, le voyage en avion de Varsovie à Paris, le bateau qui le conduit enfin de Marseille à Tel-Aviv.

Dans tous ces récits, le lecteur retrouvera la merveilleuse intelligence de Julius Margolin, sa capacité à analyser aussi bien son opposition foncière à la philosophie de Sartre, par exemple, que les événements de sa propre existence (avec de perpétuels allers et retours entre le passé et le présent) ou l’opposition qu’il perçoit entre l’Occident (une valeur plus qu’un espace géographique) et l’« Orient » qui désigne pour lui « le fanatisme de masse bestial, aveugle, impitoyable envers l’étranger ». Un « Orient » dont il sait bien que, par l’éducation, il peut se transmettre à tous, et même à ceux qui en ont été les victimes – comme en témoigne l’histoire du Juif devenu soldat soviétique dans « Une éducation orientale ». Et c'est aussi à travers les lieux de l’enfance qu’est exploré ce temps initiatique qui apparaît rétrospectivement comme un prélude à « l’éducation européenne » de Margolin, permettant de comprendre le cadre social et intellectuel à l’intérieur duquel se forgera le récit de l’expérience fondamentale, celle de la confrontation de l’individu à la violence d’État.

Tout en étant informé de la Shoah, Margolin n’en a éprouvé la terrible réalité qu’en découvrant à son retour les espaces juifs détruits et en constatant de visu la disparition de la population juive. Cette prise de conscience l'a conduit à s’interroger conjointement sur le Goulag et la Shoah. Il écrit alors sa seule fiction, le récit « Galia », qui porte sur l’extermination des Juifs par les Allemands et relie les deux volets – « Galia » se déroule à Stolin, un des shtetls où Margolin a vécu enfant et qui fait aussi partie des lieux parcourus après la libération et symbolisant le retour à la vie.

Si ce livre constitue d’abord la suite attendue du Voyage au pays des Ze-Ka, il est donc aussi le prélude à son écriture. Ce n’est qu’à bord de l’Héliopolis, le bateau qui le ramène en Palestine, que Margolin peut enfin prendre la plume et écrire son premier article d’homme libre. Ce n’est qu’au moment où il va enfin se retrouver en sécurité dans son pays qu’il éprouve pleinement cet état « d’affect moral » qui le conduira à se battre inlassablement pour la libération de ses anciens compagnons de souffrance.

 

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Luba Jurgenson, maître de conférence en littérature russe à l’université de Paris-IV Sorbonne, écrivain et traductrice, est l’auteur de L’expérience concentrationnaire est-elle indicible ?, éditions du Rocher, 2003, et de Création et tyrannie, Sulliver, 2009. En 2010, elle a repris l'ensemble de la traduction française du Voyage au pays des Ze-Ka, dont un tiers était inédit, offrant ainsi la première édition complète du témoignage de Julius Margolin.

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